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In The Field

Le projet de pistage du saumon au large du Groenland fournit des données cruciales

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Des scientifiques pêchent le saumon atlantique dans l'ouest du Groenland

L’année dernière a été une année record pour le programme de pistage satellitaire du saumon au large de l’ouest du Groenland. En effet, soixante-dix saumons adultes ont été munis d’une étiquette satellitaire d’archivage détachable (ESAD), une hausse importante par rapport aux 12 et aux 20 saumons marqués en 2018 et 2019 respectivement. Les chercheurs Jon Carr et Heather Perry ont passé environ un mois à  Qaqortoq à capturer et à marquer les saumons avec beaucoup de succès. Avec l’aide des habitants de la région Malu Ravn, Liili Petersen et Brian Jensen, ainsi que du doctorant de l’Université du Nouveau-Brunswick David Roth, qui a énormément pêché le saumon de l’Atlantique en mer Baltique, ils ont passé de très longues journées sur l’eau en quête de saumon.

Après avoir capturé un saumon et l’avoir muni d’une étiquette, ils ont mesuré sa longueur et son poids et ont prélevé plusieurs écailles ainsi qu’un petit échantillon de tissu, de la taille d’un grain de riz. Les mesures fourniront les données de base et l’échantillon d’écailles nous permettra de caractériser le cycle biologique du poisson. L’interprétation des marques de croissance sur les écailles nous permettra de déterminer, entre autres, combien d’années le saumon a passées en eau douce avant la smoltification. Les échantillons de tissu ont été envoyés à un laboratoire à Terre-Neuve où il a été possible de déterminer le continent et la région d’origine de la majorité des saumons.

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Endroits où les 56 étiquettes qui se sont correctement détachées ont transmis leurs données. Les chiffres vis-à-vis de chaque marque indiquent le « nombre de jours passés dans l’océan », soit le nombre de jours qui se sont écoulés depuis la remise à l’eau du saumon après la fixation de l’étiquette et la première transmission satellitaire. Vingt-six émetteurs sont restés fixés aux saumons pendant plus de 100 jours et 9 d’entre eux ont enregistré des données sur une période de plus de 200 jours.

Sur les 70 saumons marqués, 36 provenaient d’Amérique du Nord et 29 d’Europe. La région d’origine n’a pas pu être déterminée pour cinq d’entre eux. Les poissons d’origine nord-américaine provenaient tous de rivières canadiennes en 2021, deux de la péninsule gaspésienne, six du golfe du Saint-Laurent, 13 du sud du Labrador et trois de la région Bas-Saint-Laurent-Côte-Nord. La taille des poissons marqués se situait entre 58,5 et 89 cm et leur poids entre 1,4 et 9 kg. Neuf des poissons n’avaient pas de pou du poisson alors que d’autres en avaient jusqu’à 20 au moment de leur capture.

Les étiquettes satellitaires fixées sur les poissons marqués à l’automne de 2021 devaient se détacher et transmettre des données à une certaine date au printemps, avant la fin de mai 2022. Toutefois, il arrive que les étiquettes se détachent de façon prématurée pour une foule de raisons, comme des événements liés à la prédation ou des plongeons trop profonds. Sur les 70 étiquettes déployées, 56 nous ont transmis des données, une bonne proportion pour ce genre d’étude. Sur ces 56, quatre se sont détachées à la date prévue, et 6 se sont retrouvées à une trop grande profondeur (l’étiquette se détache avant d’arriver à la « profondeur d’écrasement »), une étiquette s’est détachée pour une raison inconnue (elle pourrait être découverte à une date ultérieure) et les autres se sont détachées de manière prématurée.

Les raisons pour lesquelles certaines étiquettes se sont détachées trop tôt seront examinées de plus près pendant l’analyse, et nous devrions pouvoir déterminer ce qui est arrivé à certains poissons. Il est fort probable que la prédation soit à l’origine du détachement de certaines étiquettes. La luminosité et les profils de température et de profondeur de l’eau révéleront si un saumon a été mangé par un mammifère marin ou un plus gros poisson.

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Bien que les données soient pour l’instant préliminaires, elles révéleront bien des choses au cours des prochains mois. Toutes les données seront analysées et traitées pour fournir le « trajet le plus probable », une représentation du trajet parcouru par le poisson pendant qu’il était muni d’une étiquette. Les données de géolocalisation permettent de déterminer la position du poisson à l’aide des données sur la luminosité, ce qui est difficile à faire sur terre, mais encore plus dans l’eau en raison de facteurs comme la profondeur, l’état de l’eau et sa clarté. Ainsi, même s’il n’est pas possible de déterminer le trajet véritable, nous nous fonderons sur le trajet le plus probable pour le déterminer avec plus de précision. Qui plus est, nous pourrons dresser un profil de température et de profondeur pour le poisson, ce qui révélera ses habitudes quotidiennes et ses préférences en matière d’environnement.

Nous accomplissons tout ce travail pour déterminer non seulement où se rendent les saumons, mais les conditions auxquelles ils sont confrontés pendant le trajet et obtenir des renseignements sur leur comportement. La haute mer est l’un des milieux les plus difficiles à protéger, et plus nous connaissons les habitudes et les comportements du saumon sauvage de l’Atlantique, mieux nous pourrons les protéger et l’environnement duquel nous dépendons tous.